« Industrie verte » : une ambition au service du défi de la transition

Faisant le constat d’une désindustrialisation massive en France, depuis 50 ans, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, accompagné par le ministre délégué chargé de l’Industrie, Roland Lescure, et Christophe Béchu, ministre de l’Ecologie, ont présenté, le 16 mai 2023, le projet de loi sur l’industrie verte en France, lors du conseil des ministres. Un texte qui se veut une réponse politique à la loi américaine sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act – IRA) qui prévoit, entre autres, de consacrer un budget d’environ 370 milliards de dollars à des mesures de soutien à la politique industrielle verte des États-Unis.

De fait, le projet de loi « Industrie verte » a pour objectif d’accélérer la réindustrialisation du pays en favorisant la transition écologique et en s’inscrivant dans le cadre des propositions de la Commission européenne visant à soutenir le développement des technologies vertes. Pour Bruno Le Maire, l’objectif final, « est de faire de la France la première nation décarbonée en Europe ».

Pour mémoire, depuis 50 ans, la France a connu une perte de 2,5 millions d’emplois industriels, et la part de l’industrie dans la richesse nationale a été réduite de moitié, passant de 22 % à 11 % du PIB. Aussi, alors que l’objectif du gouvernement est « de remonter la part de l’industrie dans le PIB de 10 à 15 %, avec des décisions majeures : allègement de la fiscalité sur le capital, simplification des procédures, accent sur la formation… », Olivier Véran a souligné que la France est entrée dans « trente [années] prometteuses » en matière de relance industrielle. Une déclaration sous forme de promesse qui doit s’articuler autour de deux ambitions : devenir leader des technologies vertes de décarbonation et décarboner et verdir les industries existantes.

Devenir leader des technologies vertes de décarbonation

Des subventions à la décarbonation sont en effet prévues dans ce texte. Dans les détails, celles-ci s’élèvent à hauteur de 2,3 milliards d’euros sous forme de prêts directs ou de garanties par la banque publique d’investissement Bpifrance, tandis que 700 millions d’euros iront en faveur de la formation, avec notamment la création d’un crédit d’impôt industrie verte, intégralement financé, en faveur des entreprises qui investissent dans le domaine des batteries, des éoliennes, du solaire photovoltaïque et des pompes à chaleur. Pour Bruno Le Maire, « la logique est simple : on finance le vert en limitant le brun ». Cela se matérialise dans le secteur automobile par un déplafonnement du malus à 50 % du prix du véhicule, la révision des critères de masse et de CO2, ou encore le verdissement des flottes des entreprises. Des subventions additionnelles seront mises en place pour les secteurs non couverts, par exemple les réseaux et les énergies renouvelables thermiques.

Le crédit d’impôt « Investissement Industries Vertes », devrait par ailleurs générer 23 milliards d’euros d’investissements et 40 000 emplois directs sur le territoire d’ici 2030, avec la facilité européenne du Temporary Crisis Framework.

Décarboner et verdir les industries existantes

Pour favoriser les nouvelles implantations ou agrandissements de sites industriels, le projet de loi entend raccourcir les délais réels d’implantation d’usines, en les divisant par deux, de dix-huit mois en moyenne, à neuf mois au maximum. A cela s’ajoute un milliard d’euros, prévu pour mettre à disposition de l’industrie, 50 sites intégralement dépollués, représentant 2 000 hectares, en pré-aménageant et pré-équipant par anticipation des sites et en dépolluant si nécessaire des friches industrielles, pour ainsi faciliter et accélérer l’implantation de sites industriels en France. « Nous voulons nous donner les meilleures chances d’avoir des filières industrielles vertes sur notre territoire », a répété Bruno Le Maire.

Concernant la commande publique, l’objectif est de favoriser davantage les produits vertueux sur le plan environnemental, en rappelant que les acheteurs publics ont le droit de mettre au même niveau les enjeux qualitatifs environnementaux et les critères prix ou encore en donnant la possibilité aux acheteurs publics d’exclure les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations au niveau environnemental à l’échelle européenne (Corporate Sustainability Reporting Directive) ou nationale (publication d’un bilan d’émissions de gaz à effet de serre et d’un plan de transition).

Ainsi, au total, le projet de loi devrait permettre de réduire l’empreinte carbone française de 41 millions de tonnes de CO2 à horizon 2030, soit 1 % des émissions totales. Il sera discuté mi-juin au Sénat et mi-juillet à l’Assemblée nationale.